Après les Hébreux, les Egyptiens et les peuples voisins, qui sous diverses formes l'adoptèrent, ce mode d'alimentation se répandit en Grèce. On peut penser que le pain fabriqué fut, primitivement, le même; mais, les Grecs devaient rapidement en améliorer la qualité et, surtout, en augmenter la diversité.

    Ils fabriquèrent du pain avec et sans levain, des pains de froment, d'orge et, parmi les premiers semble-t-il, des pains de seigle, des pains enrichis avec des arômes, des pains cuits sous la cendre, sur des charbons, entre deux plaques, sur une pierre coiffée d'une cloche et, enfin, dans des fours appropriés. Bien que la construction des premiers fours paraisse avoir pris naissance dans le Proche-Orient, on peut cependant ajouter que ce sont les Grecs qui en perfectionnèrent la technique et en vulgarisèrent l'emploi. Les Grecs furent aussi parmi les premiers à fabriquer de la pâtisserie et des biscuits et on dénombra jusqu'à 72 sortes de pains et de gâteaux dans la période qui précéda l'arrivée des Romains.


    C'est beaucoup plus tard que les Romains en firent, semble-t'il, à la consommation du pain. Ils s'initièrent 800 à 700 ans avant notre ère à l'utilisation des céréales, torréfiées au préalable, sous forme de farine et de bouillies. Environ deux siècles plus tard ils devaient, cependant, commencer à construire des fours en maçonnerie pour, vraisemblablement, y cuire le pain ou ce qui en tenait lieu.

    Les Romains fondèrent à Rome un collège de boulangers et en firent une corporation privilégiée. En contrepartie les boulangers furent assujettis à des règles très sévères. Ils étaient, avec leur famille, attachés à leur boulangerie et n'avaient plus la possibilité d'en sortir. C'est ainsi que le fils du boulanger n'avait pas le droit d'entrer dans l'ordre sacerdotal et qu'aucune dignité, milice ou toute autre fonction ne le déchargeait des obligations de son métier. Exception était cependant faite pour les boulangers qui avaient bien servi la République: ils pouvaient devenir sénateurs, mais ils étaient exclus de la corporation et leurs biens devenaient la propriété de leurs successeurs. Une telle rigueur dans l'organisation de la boulangerie traduit le souci des pouvoirs publics de l'époque, d'assurer un ravitaillement en pain dont la régularité et la suffisance étaient à la base de l'ordre dans la cité.

    Sous Auguste–30 ans avant J.-C.–Rome comptait 329 boulangeries qui étaient toutes, nous dit-on, tenues par des Grecs, les seuls experts dans l'art de faire du bon pain.

    Une boulangerie romaine comprenait l'ensemble du matériel nécessaire à la fabrication de la farine et du pain. Les dessins de la frise du monument funéraire d'un boulanger célèbre, Vergilius Eurysacès, visible encore à Rome, nous permettent de suivre les opérations qui se succèdent à l'intérieur d'une boulangerie romaine:
    –L'arrivée et l'achat du blé.
    –La mouture, réalisée avec un moulin romain composé en gros, d'une meule fixe et conique, coiffée d'une meule mobile, épousant la forme de deux trônes de cône reliés à leur partie la plus étroite. Le grain, introduit dans le cône supérieur est ainsi écrasé entre les deux parois dès que la meule mobile est mise en mouvement. Primitivement entraîné par des esclaves, le moulin de l'époque d'Eurysacès l'est par un cheval.
    –Le blutage de la farine, réalisé à la main.
    –La fabrication de la pâte qui est, elle aussi, obtenue mécaniquement à l'intérieur d'une auge cylindrique dans laquelle un agitateur brasse et mélange les ingrédients et dont le mouvement est entraîné par un cheval: on peut voir là l'ancêtre des pétrins mécaniques.
    –La mise en forme et la tourne des pâtons.
    –La cuisson des pains à l'intérieur de fours en maçonnerie.
    –La vente du pain après contrôle et pesage.

    Les pains confectionnés à cette époque étaient de forme ronde, comme on a pu en juger par ceux retrouvés dans le four d'une boulangerie de la ville de Pompeî ensevelie en 1'an 79 durant une éruption du Vésuve.

    L'art de faire le pain fut importé dans les Gaules à la suite de leur occupation par Jules César et les légions romaines, 50 ans, environ, avant notre ère. On peut penser qu'il en fut ainsi jusqu'à la venue des Wisigoths, des Burgondes et des Francs, durant le Ve siècle. De cette période troublée, où les Romains furent chassés de la Gaule et leur civilisation anéantie, on ne sait que peu de chose sur l'état de la fabrication du pain. S'il est raisonnable de penser que l'on continue, dans la majorité des cas, à ensemencer la pâte avec du levain, il est vraisemblable que la cuisson de celle-ci est encore très souvent réalisée sous la cendre et que la fabrication du pain demeure surtout familiale.