Leçons à retirer de la récolte 2021 de blé et de seigle panifié sans additifs

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Marc
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avr. 2022
lundi
18
10:21

Réflexions face aux résultats de la récolte de céréales de la saison 2020-2021 au niveau de la conservation de ces céréales et de la panification de celles-ci.

Constats
La saison 2020-2021 a souffert de pluies diluviennes impressionnantes, 100 l./par jour en moyenne en province de Liège en mi-juillet 2021 et même une pointe 250 l./par jour à Jalhay(B) ou pourtant une collection d’épeautres de haute tiges n’a pas versé.
Ce sera au point que dans les cas extrêmes certains champs seront inondés et pollués.
Dans les cas moins désespéré et de manière générale cela a occasionné un passage tardif de la moissonneuse exposant bien plus la récolte à la germination sur pied.
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Après moisson, les conservations ne pouvant pas se réaliser de manière idéale au niveau du séchage (c.à.d., atteindre les 13-15 % d’humidité) et du triage (élimination des grains rapetissés par l’attaque des moisissures) seront plus exposées à l’attaque de mycotoxines.
Début 2022, certaines fermes dans l’Ouest - France ont pris la peine de mesurer la teneur en fusariotoxine (venant de la microflore des champs) de leur farine, pour le déoxynivalénol (DON en abrégé et Vomitoxine autrefois) elle était de 1.550 µg/Kg alors que la norme a ne pas dépasser est 750 µg. La teneur d’une autre fusiariotoxine, la zéaralénone était tout juste au niveau de limite autorisée.
L’Ochratoxine A (venant plutôt de la microflore du stockage), produite par d’autres champignons (Aspergillus et Penicillium), obtenait dans ces lots 23,5 µg/kg alors que la teneur limite autorisée est de 5 µg/kg.
Ce qui avait alerté des fermier.es et qui les ont incité à faire des analyses était la perception d’une odeur désagréable traitée parfois d’odeur de renfermé ou de moisissures se poursuivant jusque dans le pain.
Notons que ce sont des conditions de conservation de tel type de lots qui sont impliquées dans ce cas.
Les plus petites parcelles passant en queue de liste chez les firmes louant leurs services de moissonnage ne sont inévitablement plus en inadéquation des bonnes fenêtres météorologiques assez courtes vu la durée de la dormance du grain. Cette année 2021, certains conseillers agricoles wallons ont été jusqu’à proposer de ne pas attendre le 15% d’humidité du grain pour effectuer la récolte vu les circonstances exceptionnelles, ils ont placé le critère de 17 % d’humidité acceptable pour autant que l’on puisse sécher le grain par après pour obtenir les meilleures conditions de stockage.

Pour le seigle, plus sensible encore que le froment à la germination sur pied, la forte activité enzymatique déclassait cette céréale de la panification vers le fourrage.
Ce vécu est celui de pratiquement toutes les fermes bio recensées en Wallonie et des boulangeries au levain qui les ont panifiés obtenant « des cavernes sous la croûte » signatures de l’hyperactivité enzymatique de la farine de seigle ou autres...
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Réponses via les méthodes naturelles
Vivre cette situation en termes de déclassement vers le fourrager est la solution impitoyable du « marché » qui va ainsi jusqu’à imputer les vicissitudes du climat aux seul.es agriculteur.ices.
Cela conduit à l’exclusion et à de moins en moins panifier ces céréales vu ce vécu de récolte dans certaines régions et dans les années humides, surtout si l’époque pluvieuses va dans les périodes allant de l’épiaison à la maturation (de mi-juin à juillet-août),.
N’existe-t-il pas d’autres réponses ? Surtout pour les adeptes du circuit court et local ?
Les critères techniques n’ont-ils pas été trop formatés par et pour l’industrie alimentaire et le marché mondial ?
Pour répondre au niveau des besoins en pains « les années à fusariotoxines », on a déjà dit plus haut que le séchage après récolte est plus qu’indiqué.
La localisation des mycotoxines se situant surtout à la périphérie du grain, il est logique de retirer le son.
Ainsi on peut dire que le blutage réduit de près de 2/3 des teneurs en mycotoxines, mais dans ce cas il réduit aussi la densité nutritionnelle et l’offre des pains.
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Un autre aspect de l’étape transformation du grain en pain, c’est dans la fermentation au levain que se réduit la teneur en mycotoxines.
Peu d’enquêtes le révèle, c’est le manque de recherche qui devrait traiter le sujet, qui fait que l’on ne dit pas assez que le levain épure la présence de mycotoxines, puisque parfois des scientifiques disent que cela n’est « pas avéré ».
En fait c’est le peu d’intérêts du monde commercial sur ce type de recherche inévitablement effectuée par partenariat (entreprises privées/recherche public) qu’il faut énoncer là.
Pourtant le peu d’enquêtes effectuées remarquent toutes la dégradation des mycotoxines (on parle parfois de 95% de décomposition d’aflatoxines) par la fermentation au levain, alors que celles-ci ne sont pas détruites par la cuisson.
C’est le pouvoir épurateur de toute bonne lacto-fermentation reconnue par ailleurs.
De ce fait il vaut mieux faire analyser le pain que la farine par les services de contrôle sanitaire.
Pour terminer au niveau des difficultés de la panification du seigle (et autres blés « anciens »), c’est encore le levain qui parvient à résoudre le problèmes de l’affaissement de la mie et l’apparition des cavernes.
Cela se passe au niveau de l’apport d’acidité qu’amène la fermentation au levain qui calme l’activité des enzymes de la farine.
Plus le levain est acide plus cela régulera l’’hyper-activité enzymatique du seigle les années pluvieuses.
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Les conditions météorologiques de cette récolte 2020-2021 risque fort de se reproduire, de ce fait il est souvent intéressant d’échanger en réseau sur l’adaptation que nous devrons avoir à l’avenir pour faire face avec des méthodes naturelles de panification aux prochains cru de céréales que nous allons recevoir de la nature.
Augmenter la dose d’ensemencement de levain et veiller à une acidification plus prononcée de celui-ci par de long temps de fermentation et/ou de plus fortes doses d’ensemencement sera une des adaptations à action régulatrice sur farine complète et surtout sur de seigle ou d’autres céréales issus de populations de blés de hautes tiges et d’accessions datant d’avant le formatage par l’industrialisation de l’agriculture.

Autre point, un apport d’une partie de la farine de seigle de la pâte qui sera « ébouillantée » peut également mieux maintenir une structure et un aspect plus moelleux à la mie.
Il est vécu dans tous les pays de l’est-européen où le seigle compose les 100% de la farine du pain.
Au risque de donner un aspect non cuit au pain, cet apport ne dépassera pas les 10-15 % de farine puisque si l’on sait réchauffé la mie, on ne sait pas recuire un amidon qui est déjà gélifié.
C’est cette gélification que l’on recherche afin d’atteindre une température de 65°C de la partie de pâte.
Ce n’est donc pas l’eau qui doit être à 65°C, mais que la portion de pâte « ébouillantée » qui doit atteindre cette température.
Avec cet apport, la mie du pain de seigle en gardera une certaine texture et élasticité prolongeant la fraîcheur dans la mie.
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Bon pain
Marc
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